Parmi les racontars de Jorn RIEL, ces récits d’hommes seuls, au Groenland, la vierge froide est presque trop belle. D’abord pour Mads Madsen qui l’inventa, pour William le Noir à qui il la vendit contre un fusil double-canons. Elle s’infiltre en réalité, passant du désir de l’un au désir de l’autre, avec les droits qui s’y attachent, pour des conversations privées et les phantasmes ordinaires : « puis il fit avec Emma  ce que tout jeune homme amoureux aurait fait ».

Pour envisager comme ils l’entendent, cette femme « faite rien qu’avec des beignets aux pommes », qui a «  sauté dans l’imagination » de Mads Madsen, ces hommes offrent les rares objets de valeur, réels ou symboliques qu’ils possèdent : un fusil, une paire de jumelles, un tatouage admirable…

La lecture de cette nouvelle est d’un goût singulier car l’invention d’EMMA n’a rien d’un rêve, ni d’une illusion, elle a l’efficacité d’une présence, d’une hallucination collective, consentie et l’on suit ces aventures avec l’intérêt que l’on apporte ordinairement aux péripéties sentimentales, coups de foudre et ruptures. Ces histoires de femmes ( d’hommes ) ne nous divertissent-elles  pas des attaques du néant et de la solitude quand les dieux ne sont plus là pour nous communiquer leurs passions !

  



  La Vierge froide et autres racontars. Jorn Riel aux éditions 10X18